Ceci n'est pas vraiment un conte de Noël, mais je l'ai découvert cette semaine au cours d'une de mes lectures et il présente un côté magique qui s'accorde bien avec cette magie ambiante.
Il s'agit d'une nouvelle de Frederic Brown, parue en France dans le recueil "Lune de miel en enfer", elle a pour titre original "Too far" et est parue en septembre 1955 dans The Magazine of Fantasy and Science Fiction. Ici elle s'appelle :
Il s'agit d'une nouvelle de Frederic Brown, parue en France dans le recueil "Lune de miel en enfer", elle a pour titre original "Too far" et est parue en septembre 1955 dans The Magazine of Fantasy and Science Fiction. Ici elle s'appelle :
Rien ne cerf de courir.
R. Austin Wilkinson était un bon vivant, typique de la bonne société de Manhattan, un grand coureur de jupons et un forcené du calembour. Un exemple ? Il était incapable d'aborder son passe-temps favori sans dire : "Femmes, je suis un loup, gare à vous ! mais pas un loup-garou."
Douloureuse à entendre pour ses amis, cette plaisanterie était néanmoins, en un sens conforme à la vérité : Wilkinson n'était pas un loup-garou, mais un cerf-garou.
Chaque semaine, il passait une ou deux soirées à Central-Park, où il se transformait en cerf et se délectait à cabrioler et à courir.
Il courait évidemment le risque d'être reconnu. Mais (s'adonnant aux calembours jusque dans ses pensées intimes) il se disait que c'était un risque qui valait bien d'être couru.
Chose étrange, jamais il n'avait songé à combiner les joies de la course aux jupons avec celles de la cerfitude.
Jusqu'à ce qu'un soir, il y songea. Rien ne cerf de courir, se dit-il, il faut séduire à point. Une fois venue, l'idée ne le quitta plus. Wilkinson partit donc au galop vers le zoo de Central Park, dont il longea l'enceinte jusqu'à ce que son subtil odorat de cerf lui dise "nous y voilà !"
Il se changea en homme pour procéder à l'escalade et, dès qu'il fut retombé dans l'enclos d'une ravissante biche, il se métamorphosa à nouveau en prestigieux dix-cors.
Elle dormait. Il la poussa doucement et murmura une proposition malhonnête. La biche ouvrit de grands yeux et sursauta :
"Non ! dit-elle. Non et non. Dix fois, non.
- Dix fois ? Pourquoi pas douze !" Il lui lança un regard concupiscent et murmura : "allons ma biche, n'en faites pas tout un faon !"
En un sens, il était allé trop loin.
Il aurait sans doute pu se permettre les plus échevelées faontaisies si sa biche n'avait été qu'une biche, mais celle-ci était une garou-biche, variété de cervidés femelles qui savent se changer en humaines. Sorcière, pour tout arranger.
Elle se tranforma donc prestement en dame, courut vers le mur d'enceinte et l'escalada avec grâce. Il se changea aussitôt en homme et partit à sa suite. Aussitôt, elle lui jeta un sort qui le remétamorphosa en cerf, sans qu'il puisse jamais retrouver forme humaine.
Si vous avez l'occasion de visiter le zoo de Central Park, vous pourrez y voir un cerf au regard triste. C'est Wilkinson.
Sa tristesse se comprend, bien que la garou-biche, qui est maintenant une danceuse étoile du ballet de New-York ("gracieuse comme une biche" si on en croit les critiques), vienne parfois lui rendre visite la nuit, recouvrant à ces occasions son apparence naturelle.
Et quand Wilkinson supplie de le libérer, elle lui sourit gentiment, et lui répond qu'il n'en est pas question, qu'elle est de nature économe et qu'elle le garde en tant que cerf.
Chaque semaine, il passait une ou deux soirées à Central-Park, où il se transformait en cerf et se délectait à cabrioler et à courir.
Il courait évidemment le risque d'être reconnu. Mais (s'adonnant aux calembours jusque dans ses pensées intimes) il se disait que c'était un risque qui valait bien d'être couru.
Chose étrange, jamais il n'avait songé à combiner les joies de la course aux jupons avec celles de la cerfitude.
Jusqu'à ce qu'un soir, il y songea. Rien ne cerf de courir, se dit-il, il faut séduire à point. Une fois venue, l'idée ne le quitta plus. Wilkinson partit donc au galop vers le zoo de Central Park, dont il longea l'enceinte jusqu'à ce que son subtil odorat de cerf lui dise "nous y voilà !"
Il se changea en homme pour procéder à l'escalade et, dès qu'il fut retombé dans l'enclos d'une ravissante biche, il se métamorphosa à nouveau en prestigieux dix-cors.
Elle dormait. Il la poussa doucement et murmura une proposition malhonnête. La biche ouvrit de grands yeux et sursauta :
"Non ! dit-elle. Non et non. Dix fois, non.
- Dix fois ? Pourquoi pas douze !" Il lui lança un regard concupiscent et murmura : "allons ma biche, n'en faites pas tout un faon !"
En un sens, il était allé trop loin.
Il aurait sans doute pu se permettre les plus échevelées faontaisies si sa biche n'avait été qu'une biche, mais celle-ci était une garou-biche, variété de cervidés femelles qui savent se changer en humaines. Sorcière, pour tout arranger.
Elle se tranforma donc prestement en dame, courut vers le mur d'enceinte et l'escalada avec grâce. Il se changea aussitôt en homme et partit à sa suite. Aussitôt, elle lui jeta un sort qui le remétamorphosa en cerf, sans qu'il puisse jamais retrouver forme humaine.
Si vous avez l'occasion de visiter le zoo de Central Park, vous pourrez y voir un cerf au regard triste. C'est Wilkinson.
Sa tristesse se comprend, bien que la garou-biche, qui est maintenant une danceuse étoile du ballet de New-York ("gracieuse comme une biche" si on en croit les critiques), vienne parfois lui rendre visite la nuit, recouvrant à ces occasions son apparence naturelle.
Et quand Wilkinson supplie de le libérer, elle lui sourit gentiment, et lui répond qu'il n'en est pas question, qu'elle est de nature économe et qu'elle le garde en tant que cerf.
JOYEUX NOËL
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